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mardi, 22 avril 2014 00:00

Les raisons profondes du retour de Wade au Sénégal

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Les raisons profondes du retour de Wade au Sénégal

L'OBS - L’ex-chef de l’Etat du Sénégal revient au Sénégal après une longue période d’absence. Mais avant de fouler le sol sénégalais, Me Abdoulaye Wade a fait des confidences à ses proches sur les véritables raisons de sa venue.

Tout est parti d’un constat amer. D’une situation qui n’a pas été à son goût. Une situation qu’il n’arrive pas à comprendre. Et Abdoulaye Wade décide alors de revenir au Sénégal pour chercher les réponses aux questions qui lui taraudent l’esprit. Son retour au bercail annoncé le 23 avril prochain n’est point fortuit. De confidences faites à ses proches, il ressort que le Pape du Sopi en a assez d’avaler des couleuvres. Me Wade ne supporte plus que ses partisans soient victimes de ce qu’il considère comme de «l’acharnement».

 «Enquittant le Sénégal en juillet 2012 après notre défaite à la Présidentielle de mars 2012, j’avais à l’esprit de ne point gêner, par ma simple présence à Dakar, mon successeur à la présidence (Macky Sall, Ndlr). Auparavant, j’avais enjoint  mes anciens collaborateurs de se mettre à sa disposition et d’être généreux à son égard relativement à toutes les informations qui pourraient lui être utiles dans sa nouvelle mission. Contrairement à mes espérances et à mes appréhensions politiques les plus pessimistes, il (Macky Sall, Ndlr)  s’en est pris à mes collaborateurs et à tous ceux qui m’étaient proches, pour une raison ou pour une autre, ouvrant ainsi une saison à une vaste chasse aux sorcières qui ne disait pas son nom. Cette opération conduisait inéluctablement à la persécution des membres de ma famille, particulièrement mes enfants.»

DECEPTION : Au début, le Secrétaire général du Parti démocratique sénégalais (Pds) disait en rire. Mais au vu de l’évolution des choses, il fait vite de penser à un acharnement. «Cela me faisait rire car je prenais certaines de ses décisions comme des soubresauts politiciens. Mais à la longue, cela a fait place à un acharnement politique inutile et sans équivoque sur les personnalités du Pds et certains cadres de l’administration dont la proximité avec moi était connue de tous. C’est sur ce plan que j’ai été déçu», souffle Wade à un proche. Rapportant toujours les confidences de l’homme du 19 mars 2000, notre source renseigne que Wade a dès lors entrepris par ses relations restées à Dakar, de faire savoir raison garder au nouveau pouvoir. Mais rien n’y fit. Abdoulaye Wade décide alors d’enfiler sa tenue de guerre pour venir faire face à Macky Sall, son fils adoptif et libérer Karim Wade son fils biologique. «Pour toutes ces exactions faites aux responsables de mon parti et à mes proches, j’ai estimé que c’était vraiment trop, et qu’il était temps et surtout compréhensible que je revienne auprès des gens que l’on cherche vaille que vaille à humilier devant leurs enfants, parents et amis, avec la complicité d’une certaine administration. Il est grand temps que je participe beaucoup plus à la  libération du pays de certaines pesanteurs nuisibles à son image internationale de terre de démocratie et de stabilité.»

SILENCE : Me Wade a rapporté à ses proches qu’il est convaincu que ses militants emprisonnés sont des otages pour le régime en place. Mais tonne-t-il : «Habituellement, les preneurs d’otages réclament ou exigent une rançon. Mais dans le cas d’espèce, nous ne verserons aucune rançon, sous aucune forme que ce soit, ni financière ni politique ni d’aucune autre nature. Pour ce qui est du cas spécifique de Karim Wade, que j’aime aborder singulièrement, j’ai volontairement adopté la stratégie du silence sur son affaire. Je sais que personne ne peut lui trouver de griefs valables si l’on parle d’enrichissement illicite. C’est comme si j’avais décidé de le laisser entre leurs mains pendant un an. Ils ont orchestré tous les scénarii imaginables et possibles. Tous leurs plans ont lamentablement échoué. Seule une grandeur dans l’épreuve leur reste, mais ils ont choisi de persévérer dans l’erreur du début et veulent à tout prix sortir de cette fameuse traque sans grands dommages politiques.» Dans ses confidences, Me Wade a dit-il trouvé dommage que Macky Sall se laisse influencer. «Je connais Macky Sall mieux que quiconque. Evidemment, lui aussi me connait bien. Je sais distinguer aisément ce qu’il fait d’initiative et ce qu’on lui fait faire, il n’y a pas photo dans ma tête à propos de ses agissements, le tri est facile à mon niveau.»

COMBAT : Après sa déception et son long silence, Abdoulaye Wade décide qu’il faut redescendre sur le terrain politique. A ses proches, il dira : «J’ai combattu durant un quart de siècle pour l’avènement d’une société démocratique réelle au Sénégal, pour un développement économique durable, avec des résultats globaux que l’humanité toute entière a reconnus à leur juste valeur. J’ai été défait lors de ma dernière compétition électorale par la seule volonté de mes compatriotes et j’ai respecté leur choix. Mais s’il faut redescendre sur le théâtre des opérations pour un combat contre le recul démocratique, l’instauration d’un Etat vindicatif, une chasse aux sorcières, je suis disposé à mettre mes dernières armes pour que le Sénégal, avec ses acquis et avancées que nous avons bâtis au prix de notre vie et libertés individuelles et collectives, ne sombre pas dans des travers. La seule bataille qui vaille pour moi est celle consistant à être la sentinelle pour la préservation des acquis, tout en souhaitant que le flambeau soit porté toujours plus haut par les pouvoirs publics qui se succéderont à la tête de notre pays. Je n’ai aucune autre préoccupation politique. »

ACCUEIL : Me Wade a tenu à rassurer ses interlocuteurs. «Je n’ai aucune intention avouée ou cachée d’entraver la bonne marche d’une justice équitable parce qu’indépendante. Mais je ne saurais accepter les agissements et décisions d’une justice au service et aux ordres de l’Exécutif.» Pour ce qui est de l’accueil royal que ses proches veulent lui réserver, Me Wade se dit convaincu qu’on ne peut pas arrêter la mer avec ses bras. «Pour les inquiétudes mal fondées à propos de l’accueil que les Sénégalais nostalgiques voudraient me réserver, je rétorque que l’on n’arrête pas la mer avec ses bras. J’ai un agenda bien ficelé pour ce voyage et je le déroulerai progressivement, si telle est la volonté divine. Il s’agit juste d’essayer de contenir l’enthousiasme des gens envers ma modeste personne et ça c’est l’affaire des services de sécurité publique. Je resterai au Sénégal le temps qu’il sera nécessaire. Tout dépendra du déroulement des affaires politico-judiciaires et de mes activités personnelles sous d’autres cieux.»

CODOU BADIANE

ABDOULAYE WADE, ANCIEN PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DU SENEGAL

«Mon retour est hautement politique»

 

Président de la République du Sénégal de 2000 à 2012, Abdoulaye Wade vit depuis, en France. Après deux ans d'absence, il se rendra, mercredi 23 avril, à Dakar. Son élection avait mis fin à quarante années de présidence socialiste au Sénégal. Il a été battu en 2012 par l'actuel Président, Macky Sall. Son fils et ancien ministre, Karim Wade, est emprisonné depuis un an pour «enrichissement illicite», dans le cadre d'une série d'enquêtes lancées par le nouveau pouvoir contre d'anciens hauts responsables. Abdoulaye Wade, 87 ans, dénonce un acharnement politique contre lui et ses proches.

Quel est l'objet de ce déplacement à Dakar ? S'agit-il d'un retour politique ?

J'ai été président de la République pendant douze ans, avant de perdre les élections ; je rentre dans mon pays après deux ans d'absence ; et je suis resté, à la demande des militants, le secrétaire général de mon parti, le Parti démocratique sénégalais (Pds). Tout cela fait que mon retour est hautement politique, surtout dans les circonstances actuelles où il y a beaucoup de difficultés au Sénégal. Il y a un fort mécontentement : les Sénégalais ont comparé le régime actuel avec le mien et ont tiré les conclusions qui s'imposent.

Deux ans après l'arrivée au pouvoir de Macky Sall, quel message voulez-vous délivrer ?

Je vais remercier les électeurs qui ont voté pour moi en 2012 et se sont battus jusqu'au bout. Je m'adresserai à la jeunesse sénégalaise, qui souffre de la hausse du chômage et qui manifeste. Quand j'étais Président, il y avait le chômage, mais j'ai créé beaucoup d'emplois, attiré de gros investissements qui ont fait de Dakar une ville moderne avec des infrastructures remarquables. Aujourd'hui, on assiste au départ des entreprises étrangères que j'avais fait venir. Mon deuxième message ira à mes sympathisants : à l'heure actuelle, le Pds est le parti majoritaire, même s'il est dispersé, du fait de l'absence d'un leader capable de fédérer tout le monde. Mon troisième message s'adressera à Macky Sall. Il est le Président. Il est donc responsable des tensions actuelles, notamment politiques. Dès le lendemain de son élection, il a commencé à faire campagne pour être réélu en 2017. S'il a mis mon fils Karim en prison, c'est parce qu'il voyait en lui le seul rival capable de l'affronter. Je vais lui dire que je ne souhaite pas qu'il y ait un affrontement pour le pouvoir au Sénégal, mais que, pour cela, la démocratie doit revenir. Macky Sall est conscient de la dégradation politique, économique et sociale du Sénégal. Il faut y mettre fin. Je veux la paix et la démocratie, mais s'il persiste à maintenir des innocents en prison, j'utiliserai tous les moyens légaux pour combattre son régime.

Votre fils Karim, en détention préventive depuis un an, sera renvoyé devant la Cour de répression de l'enrichissement illicite (Crei) et jugé dans les deux mois. Comment avez-vous réagi ?

J'ai été satisfait de cette annonce. On reprochait à mon fils Karim d'avoir dissimulé 800 milliards FCfa. Le Procureur a ramené cette somme à 350 milliards. Puis, la commission d'instruction de la Crei l'a encore ramenée à 117 milliards FCFa. 80 % des accusations sont déjà tombées, non pas du fait des avocats de Karim, mais parce que la commission d'instruction, en examinant les documents, a vu que ça ne pouvait pas être mis à la charge de Karim. Nous allons balayer facilement les dernières accusations.

La traque des biens mal acquis, lancée par le gouvernement du Président Macky Sall, n'est-elle pas une initiative importante ?

Lutter contre les détournements est important. J'ai moi-même mis onze inspecteurs des finances en prison quand j'étais Président. Mais ce n'est pas une raison pour accuser des innocents. Macky Sall a utilisé l'idée de la traque des biens mal acquis pour combattre Karim, le faire condamner, le priver de ses droits civiques pour qu'il ne se présente pas en 2017. Pour servir cette cause, il a ressuscité la Crei, une cour créée en 1981, qui n'avait pas été activée depuis trente ans et qui avait disparu de l'architecture judiciaire du Sénégal. Il a pratiqué une chasse aux sorcières contre mes collaborateurs et moi.

Vous êtes très critique du bilan de votre successeur. Mais votre dernier mandat a été marqué par un fort mécontentement social.

Certains ne comprenaient pas ce que j'étais en train de faire : construire des routes, des infrastructures, une Université. Je construisais des fondations solides pour le Sénégal. Mais le mécontentement a aussi été amplifié par mes adversaires. Ils ont réussi à mobiliser contre moi, à Dakar, mais pas à l'intérieur du pays. Globalement, la population était satisfaite.

Le Sénégal reste un îlot de stabilité dans une région agitée. Craignez-vous que la crise malienne puisse le déstabiliser ?

Non, je ne crois pas que le Sénégal soit menacé. Les marabouts ont un poids très important dans la population. Or ils pratiquent un Islam tolérant. Ils sont des garanties contre l'extrémisme.

En un an, la France a mené deux interventions militaires en Afrique : au Mali et en Rca. S'agit-il de néocolonialisme ?

L'intervention au Mali était une bonne chose. Elle était demandée par le gouvernement malien. En Centrafrique, les affrontements étaient tels qu'une intervention était aussi nécessaire. Mais on aurait dû procéder autrement : organiser une conférence internationale pour dégager la nécessité d'une intervention extérieure et ensuite saisir le Conseil de sécurité de l'Onu. Cela aurait donné une légitimité à la France.

François Hollande avait annoncé une rupture dans les relations entre la France et l'Afrique. A-t-elle eu lieu ?

La Françafrique n'existe plus, mais la France n'est pas indifférente à ce qui se passe en Afrique. Vu ses intérêts économiques, elle ne le peut pas. Les déclarations officielles sont une chose, mais les réalités sont là. Pour intervenir en RCA, la France n'a demandé l'autorisation d'aucun Etat africain.

Les interventions françaises ne signent-elles pas l'échec des Etats africains ?

Nous aurions dû être capables de résoudre nos propres conflits. Malheureusement, l'organisation que nous avons aujourd'hui ne permet pas de le faire. L'Union africaine n'a aucun pouvoir. Nous serons pris au sérieux quand nous pourrons peser sur la politique mondiale, quand nous aurons formé les « Etats-Unis d'Afrique».

Nourrissez-vous des ambitions politiques ?

J'ai dépassé l'âge d'avoir une ambition politique. Briguer un poste au Sénégal, c'est fini. Ce qui ne veut pas dire que je sors de la politique. Je dirige le parti le plus important du pays. J'ai aussi créé un bureau à Dubaï, Wade International Consulting, pour transmettre mon expérience à d'autres chefs d'Etat africains.

CHARLOTTE BOZONNET (LE MONDE)

source: http://www.gfm.sn/actualites/item/13927-les-raisons-profondes-du-retour-de-wade-au-senegal.html

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